Diphtong Cie est accueillie en résidence à Montévidéo du 11 au 28 juin 2021 pour Nous campons sur les rives.
Il y a des auteurs discrets dont on se transmet le nom comme un talisman ou un signe de reconnaissance. Mathieu Riboulet est de ceux-là. Sans tapage, ses livres font leur chemin dans l’esprit du lecteur, créant au fil du temps une constellation de fidèles. C’est ainsi que le metteur en scène Hubert Colas et le comédien Frédéric Leidgens ont découvert qu’ils partageaient un même intérêt pour l’oeuvre de Mathieu Riboulet. Ensemble, ils ont eu envie de faire entendre Nous campons sur les rives. Cette oeuvre un peu à part est le fruit d’une allocution commandée à l’auteur par l’historien Patrick Boucheron à l’occasion du Banquet du livre de Lagrasse où elle a été prononcée en août 2017. Cette méditation lumineuse où l’écrivain se place d’emblée en situation « dans la lumière, le vent, les pierres, le sable et les odeurs d’ici » est peut-être la plus belle introduction à son écriture.
En contrepoint à cette oeuvre, Hubert Colas a souhaité confier un autre texte de l’auteur à l’acteur Thierry Raynaud, complice de longue date, pour une exploration multiple de l’écriture de Mathieu Riboulet. Il a eu envie d’éprouver avec cet acteur d’une grande dextérité mêlée de grâce, comment posséder cette écriture, comment la laisser agir et faire corps avec elle. Thierry Raynaud interprète le texte « Dimanche à Cologne », extrait de Lisières du corps. Une forme de portrait, de rêverie, de peinture, tentant de saisir au plus près du geste, de l’intention, de la peau et des os, comment le corps se courbe, s’offre ou se dérobe.
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Créée en 1988, Diphtong Cie est dirigée par l’auteur, metteur en scène et scénographe, Hubert Colas. Hubert Colas a monté, avec sa compagnie, nombres de ses textes : Temporairement épuisé (Théâtre de la Bastille – Paris, 1988), Sans Faim (Théâtre National de Strasbourg, 2004), Le Livre d’or de Jan (Festival d’Avignon, 2009), Texte M (Théâtres Garonne et Sorano – Toulouse, 2015)… mais aussi des textes, souvent non théâtraux, d’auteurs contemporains tels que Christine Angot, Sonia Chiambretto, Martin Crimp, Rainald Goetz, Witold Gombrowicz, Sarah Kane, Annie Zadek… Il a traduit et mis en scène Hamlet, présenté au Festival d’Avignon en 2005.
Hubert Colas collabore fréquemment avec les comédiens Thierry Raynaud, Manuel Vallade et Isabelle Mouchard et s’entoure régulièrement de la même équipe artistique : Sophie Nardone (assistanat à la mise en scène), Pierre Nouvel (création vidéo), Frédéric Viénot (création son), Fabien Sanchez (création lumière)…
Né en 1960 en région parisienne, Mathieu Riboulet fait des études de cinéma et de lettres modernes à Paris-III, et réalise pendant une dizaine d’années des films de fiction et documentaires auto-produits. Dans les années 1990, il se tourne vers la littérature, pour réaliser une oeuvre d’une quinzaine d’ouvrages parus essentiellement aux Éditions Verdier. Des récits souvent marqués par l’art et le désir homosexuel, poétique, à la charnière de l’autobiographie et de la fiction comme récemment Entre les deux il n’y a rien, éveil à la conscience politique et au désir dans les années 1970. En 2015, il co-signe avec l’historien Patrick Boucheron, Prendre dates, recueil de réflexions croisées et profondes, nées de l’onde de choc provoquée par l’attentat contre Charlie Hebdo en janvier 2015. Il est également l’auteur de L’amant des morts (2008), livre poignant sur le sida récompensé par le prix Thyde Monnier de la SGDL (Société des gens de lettres) et en 2009 par le prix de l’Estuaire. Mathieu Riboulet a reçu le Prix Décembre 2012 pour « Les oeuvres de miséricorde ». Il meurt à Bordeaux le 5 février 2018.
© Hervé Bellamy